Quand j’avais dix ans, soit dans les années ‘90 (ouille, ça pique !), le curry pour moi, c’était une poudre jaune qui colorait la sauce et avait un petit goût épicé. Je n’aimais pas beaucoup ça car on y mélangeait souvent des fruits ou du sucre. Comme le (trop) sucré-salé ne me plaisait pas, je n’en mangais pas beaucoup.
En Belgique, nous trouvons un grand nombre de tartinades chez les bouchers pour garnir nos sandwiches. Il existe notamment la salade de poulet curry qui a son petit succès chez les gourmands mais qui ne me plaisait pas beaucoup non plus.
Mes débuts avec le curry n’avaient donc rien du coup de foudre. Et pourtant…
Quelques années plus tard, l’accès aux produits asiatiques est devenu bien plus large. Ado, j’ai commencé à cuisiner et à fréquenter les petits restos pas chers que mon argent de poche pouvait se permettre. Et là, j’ai découvert la forêt derrière l’arbre !
Les currys, et pas le curry!
La forêt en question possédait pas mal d’arbres puisque des currys, il y en a beaucoup! En effet, le curry désigne un mélange d’épices donc même à travers un curry désigné, les variations et les proportions des aromates peuvent encore considérablement modifier la saveur.
Le curry, ça représente toute la générosité d’une région et les habitudes de ses habitants.
Par exemple, le curry du Nord de l’Inde integrera souvent plus de gingembre, d’ail et de tomate alors que le Sud sera un peu plus sec avec des dominantes de cumin et coriandre.
De la Thaïlande à l’Inde en passant par le Japon, il y a beaucoup de variations autour de ce thème.
Je vous propose de faire une promenade dans l’univers coloré de ces petites bombes de goût!
Inde: les currys épicés
La différence fondamentale avec les currys thaïlandais réside dans l’onctuosité du curry. En effet, les épices sont mélangées avec du yaourt ou de la crème, pas avec de la noix de coco.
De façon générale, les bases du curry indien sont le cumin, le curcuma, le piment, les baies de coriandre, les graines de moutarde, la cardamome, le gingembre et l’ail.
Chaque région (et chaque cuisinier !) ayant son propre grain de sel à y apporter, cette liste est aménagée de telle sorte que certains currys peuvent compter jusqu’à 90 ingrédients différents !
Le Curry de Madras
On commence par l’un des plus connus qui est le plus facilement accessible puisqu’il est moyennement piquant.
Il est composé de curcuma, ail séché, piment, cannelle, macis, gingembre, cardamome, clou de girofle, coriandre, cubèbe, cumin, fenouil, fenugrec, feuilles de curry, graines de moutarde, poivre.
On peut dire que ce curry sert plutôt à aromatiser les plats qu’à les rendre piquants. On s’en sert dans les plats de crustacés, de volailles, de légumes, dans les salades et même parfois pour certains desserts.
Si vous n’aimez pas ce qui est piquant, il est parfait pour chatouiller vos papilles sans les déranger.
Le Garam Massala
En hindi, garam signifie « chaud » et masala « mélange ». Sa base est identique au curry madras, si ce n’est qu’il contient un peu plus d’éléments et utilise notamment de la noix de muscade et de la cannelle.
Il possède donc des arômes légèrement plus boisés que le Madras. Il reste généralement plutôt doux.
On retrouve aussi le garam massala dans la cuisine mauricienne et réunionnaise.
Le Vindaloo
Le vindaloo est une spécialité de l’île de Goa, dans le sud de l’Inde. Il accompagne traditionnellement du poulet, de l’agneau, ou encore des pommes de terre.
On passe très clairement un cran au-dessus dans l’échelle de Scoville pour la force du piment. Les pots de sauce Vindaloo qui sont vendus dans le commerce sont bien piquants mais restent agréables pour ceux qui consomment régulièrement d’autres types de sauces pimentées (Gochujang, sambal oelek,..).
Mais si vous allez dans un restaurant indien qui le prépare à la façon indienne, ne présumez pas de vos forces et demandez un échantillon si possible. Pour en avoir déjà fait l’expérience, j’ai dû renoncer à manger mon plat car il était beaucoup trop piquant. Et pourtant je mets du piment dans les trois quarts de mes plats!
Le Curry Kashmiri
Le curry Kashmiri est un masala doux, parfumé, typique de la région du Cachemire en Inde. Ses touches dominantes sont la cannelle, la cardamome, le carvi, le cumin, le clou de girofle et la noix de muscade. Il est généralement préparé avec des amandes ou de la noix de cajou, ce qui renforce son côté gourmand.
Ce curry se marie parfaitement avec les viandes rouges, les ragoûts d’agneau et de mouton. En version végétarienne, les pois chiches lui iront comme un gant.
Japon: le roux de Kari (ou Curry)
Ce n’est pas le plat le plus évident quand on évoque la gastronomie japonaise. Et pourtant, le curry est un plat très apprécié et régulièrement conosmmé dans les restaurants japonais du Japon. ll est plutôt appelé ‘kari’ou ‘karé’.
Petite anecdote que je trouve plutôt drôle: le curry est repassé en Europe pour se faire connaître au Japon! La Grande-Bretagne ayant colonisé l’Inde au milieu du XIXe siècle, c’est la marine britannique qui a « importé » le curry au Pays du Soleil Levant.
Les Japonais le mangent de trois façons différentes: le riz au curry, le karé-pan (soit un pain fourré au curry qu’on trouve dans beaucoup de combini ou de boulangeries) et le karé-udon soit des nouilles udon dans une sauce au curry.
Le curry japonais est assez épais et plutôt doux dans sa version la plus répandue. Il existe toutefois des puissances de piment différentes qu’on choisit au goût: mild (doux), medium ou hot (piquant).
Lorsqu’on achète le mélange dans le commerce, il se présente sous forme de plaquettes avec des carrés à casser (un peu comme du chocolat) pour préparer la sauce. Ces carrés seront tout simplement mélangés à de l’eau pour former un roux de sauce. Car le mélange contient de la farine (souvent de blé) qui lui donne une consistance assez épaisse.
Cette version du curry ne contient donc pas ni de crème ni de coco ni d’oléagineux.
Voici une des recettes réalisées avec du curry japonais.
Thaïlande: les currys frais
On arrive maintenant en Thaïlande, pays verdoyant aux herbes parfumées qui ne demandent qu’à se glisser dans nos assiettes! Les currys se présentent plutôt sous forme de pâtes car ils contiennent bon nombre d’aliments frais, gorgés d’eau ou d’huile.
Leur puissance aromatique est très différente selon le type de curry, je vais donc les passer en revue en allant du plus doux au plus piquant.
Le Curry Thai Jaune
Le curry jaune est le plus doux. Elaboré à partir de piments jaunes et rouges, d’échalotes, de cannelle et de curcuma, il s’agit d’une pâte parfumée qui fera merveille pour aromatiser un plat “tous publics”. Les petits l’aiment assez facilement car son mélange avec le lait de coco le rend un peu sucré.
Le Curry Massaman
Le curry massaman est un plat légèrement épicé qui provient de Perse et n’est arrivé en Asie du Sud-Est qu’au 17e siècle. Principalement consommé dans le centre et le sud de la Thaïlande, le massaman contient des ingrédients exotiques différents des autres curries thaïs: le jus de tamarin, le laurier et le clou de girofle.
Ce curry est traditionnellement accompagné de bœuf. On peut y ajouter des pommes de terre et des cacahuètes pour le rendre encore plus nourrissant et savoureux.
A noter qu’en version végétarienne, il sera particulièrement savoureux avec des haricots blancs!
Le Curry Panang
Moyennement épicé et légèrement sucré, le Panang est réalisé à partir de piments rouges séchés, de citronnelle, laurier, cumin, cardamome, combava et arachides. Parfois, il contient également de la pâte de crevettes. A vérifier donc si on ne désire pas en consommer. Ce plat, principalement dégusté dans le centre de la Thaïlande, ressemble au curry rouge, bien que le goût de combava soit plus prononcé dans ce dernier. Il contient également des cacahuètes, ce qui le rend un peu plus épais.
Traditionnellement, les Thaïlandais parsèment le Panang de cacahuètes écrasées avant la dégustation.
Une petite recette de Panang? Cliquez ici !
Le Curry Thai Rouge
Le curry rouge tient sa couleur vive des piments rouges frais, des échalotes, de la citronnelle fraîche et des graines de coriandre qui le composent.
J’en profite pour faire un petit détour par Singapour où le curry rouge est roi. Il est présent dans presque tous les plats de la gastronomie singapourienne, et notamment dans le »Laksa » (soupe de nouilles chinoises à la noix de coco et curry rouge) qui est tout simplement divin.
Le curry rouge a une puissance modérée et n’est pas compliqué à manier. On peut le doser pour le mélanger à du lait de coco et en faire une sauce crémeuse pour tous types de plats.
A noter qu’il sera également appréciable en petite touche dans une mayonnaise. Que ce soit pour dipper des chips ou crudités ou pour tartiner un sandwich, il saura relever le shmilblick avec talent.
Voici une recette de ramen au curry rouge
Le Curry Thai Vert
Le curry vert est très clairement le plus piquant de tous les currys thaïs! Dans sa composition, on trouve de l’ail, du gingembre chinois, du basilic thai, des zestes de combava… et beaucoup de piments verts!
C’est l’un de mes préférés et j’en ai pratiquement toujours un pot dans le frigidaire. Il fait danser vos papilles, langue, gencives et doit trouver un bel équilibre avec le lait de coco pour garder sa puissance sans tout dévaster sur son passage.
Il vaut toujours mieux avoir un petit morceau de pain à proximité quand on n’est pas habitué. A nouveau, si vous allez dans un restaurant thaï qui fait de l’authentique, prenez vos précautions. Pain et lait aideront à éteindre l’incendie si on a présumé de sa résistance au piment.
Cliquez ici pour trouver une recette de curry vert aux légumes que j’ai réalisée.
Le curry dans le reste du Monde.
Le curry étant un mélange d’épices, il se décline de multiples façons, et ce dans le reste du monde. On l’appelle masala, curry, kari, il peut évoluer vers le colombo.
Voici quelques variations rapides du dans d’autres parties du monde:
Sri-Lanka
Proche de l’Inde, le Sri-Lanka a également une grande tradition de curry. Celui-ci fait toutefois la part belle aux légumes et aux fruits tropicaux dont il regorge. La noix de coco, le fruit du palmier et la mangue ou les légumes tels le radis, l’aubergine et la citrouille sont très populaires dans la gastronomie sri-lankaise.
Citons par exemple le Rabu Curry, à base de radis blanc frais, d’oignons et de piments qui est cuit dans un curry de noix de coco à base de graines de moutarde et de fenugrec, de curcuma et de cannelle.
Birmanie
Il y a une forte immigration indienne en Birmanie, notamment dans la capitale, Rangoon. Le mélange d’épices utilisé dans les plats birmans est donc similaire au curry indien. En Birman, curry se dit ‘sepyan’.
Une recette courante est le curry d’oeufs (ou chin hin). Ce plat se compose d’œufs durs dans une sauce à base d’épices, tomates, tamarin, ail et sauce de poisson.
Il y a encore une foule de pays qui comptent le curry dans leur gastronomie: la Corée, l’île Maurice, Madagascar, la Malaisie, l’Indonésie,…
Mais plutôt que de vous les expliquer, je vous invite à me rejoindre sur la page Facebook du groupe de recettes végétariennes pour que nous puissions tester ensemble de délicieuses trouvailles !
Quel curry préférez-vous? Une astuce maison pour le rendre particulièrement gourmand ?
Incroyable ! Ton article est magnifique ! Que ce soit pour les recettes, les descriptions ou les illustrations magnifiques… je me promets de ne plus jamais venir lire ton blog à 1 heure du prochain repas… Trop dur 😊😊 Merci. En plus le curry est une de mes épices préférées alors…
Merci Nicolas! Moi aussi, j’ai des gargouillis dans l’estomac qui commencent à se manifester 🙂 🙂
Ton article m’a donnée faim !!! Les photos sont magnifiques et me donnent envie de chercher quelques nouvelles recettes de curry. Je ne savais pas que le garam masala faisait partie des currys.
J’ai participé à un cours de cuisine en Thailande où j’ai appris à réaliser le curry vert thailandais, c’est un vrai régal. Une fois de retour, j’ai remplacé les piments verts par des poivrons verts pour le faire goûter à ma mère qui n’aime pas les plats épicés. Elle a adoré !
C’est une bonne idée de remplacer les piments verts par des poivrons! Tu as réalisé la pâte de curry toi-même alors? C’est vraiment le must ! Ca prend un peu de temps mais ça vaut vraiment la peine! J’avais également participé à un cours de cuisine au Cambodge pour réaliser un Amok, sorte de curry khmer. C’était merveilleux d’avoir les ingrédients tout frais sur place pour cuisiner.